Lycée éco-responsable

Café philo : le bonheur dépend-il de nous ?

Par DOROTHEE BERT, publié le jeudi 23 juin 2016 10:49 - Mis à jour le jeudi 1 septembre 2016 14:03

A l’occasion de la journée du sourire réalisée le 13 octobre 2015. Un café philo a été proposé aux élèves, agents et professeurs du lycée. Cet espace d’échange singulier a réuni une quarantaine de personnes.


Après un propos introductif développé par Mme Faure professeure de philosophie au lycée nous invitant à une réflexion personnelle sur" la journée du sourire, une journée qui fait sourire !".


Nous avons échangé et donné notre avis. Cet échange adulte-jeune dans un cadre autre, transdisciplinaire et autour d’un café a été très enrichissant.
Ce fut l’occasion :
- pour des élèves de seconde de découvrir cette "matière" ou "manière" de (re)voir le monde qui nous entoure.
- pour des élèves de terminale et adultes : de prendre le temps de s’interroger, de se questionner de faire sens ensemble !

Merci à Mme Faure pour ce changement de perspective.

Texte écrit par Mme Faure pour le café philo.

La journée du sourire ça fait sourire…et j’espère que ma formule aussi ….
Deux manières au moins d’entendre cette phrase, une manière naïve, innocente, propice au bonheur : on sourira parce qu’on souriait déjà, la vertu de notre attitude est enfin nationalement reconnue ou au moins aujourd’hui dans ce lycée, nous qui avons le goût des smileys, on est « cool » … ou on sourira, on fera aujourd’hui cet effort pour signifier qu’on n’est pas en guerre avec les autres, qu’on peut cesser de se plaindre et que c’est cette bonne humeur volontaire qui pourra nous rendre plus heureux car le bonheur suppose aussi bien la paix avec autrui qu’avec soi-même. On espèrera par-là tenir la clé du bonheur. Il ne tient qu’à nous pour être heureux de changer d’attitude et ce n’est plus comme l’indique l’étymologie du mot une affaire de chance, la bonne « heur », la bonne chance parce que là ce serait injuste cette affaire de bonheur. Ouf on est sauvé : on peut tous être heureux et l’égalité des chances préservée même dans la quête du bonheur. Attitude naïve qui témoigne d’un désir d’y arriver malgré tout et qui fait le succès de ces psy comportementalistes qui nous disent que oui on peut être heureux, oui , il y a des méthodes pour cela et qu’elles sont à notre portée, contenues dans un livre. Mais qui sait si ce sourire tiendra jusqu’à la nuit ?


L’autre manière est plus critique, plus ironique et peut même parfois aller jusqu’au cynisme selon notre disposition à croire ou non au bonheur. Car le bonheur est plus qu’une émotion passagère, c’est un état intérieur subjectif qui éprouverait une satisfaction stable, durable qui aurait les ressources pour digérer le négatif auquel notre désir est inévitablement confronté au cours de son existence parce qu’il y aurait une pulsion de vivre, un appétit qui permettrait d’y croire malgré tout. Il n’y a pas de bonheur sans malheur possible, et c’est parce que nous le savons que nous connaissons la valeur du bonheur. Comme le dit Nietzsche « le bonheur et le malheur sont frères jumeaux, ils grandissent ensemble ou ils restent petit ensemble ». Or, cette journée en appelle à une attitude volontairement positive, c’est par là que passerait le bonheur, c’est une prescription comme le 8 mars ou le 14 février, pour un jour respectons les femmes quitte à les mépriser le reste de l’année, et pour un autre jouons, mimons l’état amoureux. Ayons plutôt pour but de rendre ces journées inutiles. En effet, Ces journées qui rappelle un devoir, une éthique morale et sociale(8 mars), sociale et/ ou personnelle (14 février) font symptôme : elles signifient le malaise du social ici qui a du mal à faire lien, entendons jour après jour les plaintes des élèves (ils en peuvent plus des profs) des profs,( ils en peuvent plus des élèves) peut-être même des élèves entre eux…la notion même récente « de climat scolaire » fait peur et dit bien quelque chose. Bref, la plainte occupe nombre d’individus et elle indique que le désir ne s’y retrouve pas dans le réel et elle prend prétexte de n’importe quel fait anecdotique pour se dire. Cette journée est alors une invitation à s’entendre, à sourire et à réfléchir ici sur le bonheur : dépend-il de moi ? Quelles en sont les conditions subjectives ?Objectives ? Il y a comme une prescription « souris » « sois heureux », une attitude positive qui voudrait faire l’impasse sur le politique, le social et se contenter de « liker » toute la journée serait évidemment un bonheur artificiel digne de Disney comme le disait Descartes « aussi n’est-ce pas toujours lorsqu’on a le plus de gaieté, qu’on a l’esprit le plus satisfait ; au contraire, les grandes joies sont ordinairement mornes et sérieuse » et s’il dépend de moi, il n’est pas sûr que la volonté y suffise ; qu’on regarde en soi et on verra combien de temps tiennent nos résolutions avant de se retrouver dans les mêmes impasses. 
Faut-il en rester là ? bien sûr que non. Si le sourire ouvre les portes de l’esprit, alors cette journée ne sera pas vaine.

 

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